etudes, notions théoriques

courants de pensée

analyses

pages d'histoire

questions que l'on se pose

enquête, témoignage

poèmes

biographies

TÉMOIGNAGE – Comment je suis venue à la politique ?

À cette question, il m’est difficile de répondre sans vous parler de moi, sans vous parler d’où je viens et sans vous raconter comment j’ai construit mon opinion politique et mes convictions.

Issue d’une grande famille de sept enfants, de parents agriculteurs, j’ai appris très jeune la rigueur et la difficulté du travail. Comme me disait mon papa, « l’argent, tu le gagnes à la sueur de ton front ». Dans le monde agricole, le travail est rude, continuel, difficile de faire la différence entre la vie de famille, les loisirs et le travail. À la campagne, assez jeune, nous devions aider nos parents dans leurs labeurs. Pendant la période d’été, toute main d’œuvre supplémentaire était la bienvenue. La vie de mon père et de ma mère était rythmée par leur travail. Dans le milieu familial dans lequel j’ai grandi la religion catholique était très présente. Mes parents étaient croyants et très pratiquants, ce qui leur permettait peut-être d’accepter leur vie humble de travail comme déterminée par une force supérieure, pas de mauvais patron responsable de leurs conditions de subsistance. En grandissant et peut-être pour m’extraire du milieu dans lequel j’ai grandi, je me suis opposée à leur conviction religieuse et politique, toute en respectant leur valeur. Chefs de leur exploitation, mes parents ainsi que la majorité des agriculteurs votaient plutôt à droite.

À partir de l’adolescence et surtout à ma majorité, ayant le droit de vote, je me suis intéressée à la politique. Pour moi, le droit de pouvoir m’exprimer par le vote et de faire partie de la société de façon active était important et ne devait pas se prendre à la légère : j’ai donc essayé par mes propres moyens de m’intéresser « aux grandes idées politiques et à leurs courants ». En considérant les deux grandes lignes gauche et droite, dans leur essence, je me suis sentie plus attirée par les idées de gauche qui me semblaient plus égalitaires et plus humaines. Heureuse de l’élection de François Mitterrand au pouvoir, je pensais naïvement que les inégalités sociales et les injustices allaient s’atténuer, que les choses qui me révoltaient pouvaient disparaître lors d’un changement politique. Pour mes études, j’ai dû avec joie quitter le monde rural et enfin pouvoir, vivre en ville. Le monde urbain, dans la représentation que je m’en faisais, était synonyme de modernité, de modernité d’idées, d’ouverture d’esprit… Lors d’un stage en soin à domicile en 1ère année d’école infirmière à la Croix- Rousse, quartier de Lyon réputé comme rupin, je fus choquée par les conditions de vie, de logements. Je passais, lors de ma tournée de soins, d’un appartenant luxueux à un petit appartement où les sanitaires étaient sur le pas de porte, où il n’y avait pas de douche, le lavabo était en pierre, dans la même pièce, se trouvait le lit, le coin repas…. En ville ou la campagne, les inégalités sociales persistaient, les uns vivant dans le luxe, les autres à la limite de la décence. Comment peut-on justifier, au sein d’une société moderne, de telles injustices ? Pourquoi la politique n’a t’elle pas ou peu d’impact sur la société ? Les propositions politiques pour pallier aux inégalités me semblaient superficielles, non adaptées à la situation et humainement dévalorisantes car basées sur un système d’assistanat.

 

Ma désillusion laissa place à un désintéressement total pour la politique, comme si les choses étaient immuables, comme si l’homme n’avait pas d’impact sur ses conditions de vie et qu’il ne pouvait rien changer. Lorsque j’essayais de m’intéresser aux actualités, je ne comprenais pas tout. J’avais l’impression que le monde devenait fou Toutes ces questions me bouleversaient et me révoltaient. Mais je pensais que je n’avais pas les connaissances, l’intelligence pour comprendre. Le domaine de la politique relevait de l’élite, des intellectuels.

Les discussions avec une personne proche où il est possible de refaire le monde, de remettre en cause la société dans laquelle on vit, la lecture de Germinal, les études politiques m’ont alors permis d’éclairer mes incompréhensions et de renouer avec mon intérêt pour la politique. Il est important de comprendre le monde dans lequel on vit, les contradictions du mode de production capitaliste, permettant de s’orienter. Tout n’est pas simple et facile à comprendre… C’est un long chemin dans lequel, la progression est difficile et qui demande un effort permanent. Il faut prendre du recul par rapport aux évènements et analyser les faits réels et non pas les idées reçues qui nous sont martelées à longueur de journée. Il faut faire attention aux faux semblants, aux mots utilisés qui sont quelquefois « des miroirs aux alouettes ». Ceci demande alors un travail permanent d’analyse de la situation concrète. Mais, sur ce chemin difficile, la connaissance permet à l’homme d’avoir une action possible sur sa situation et son devenir.

 

Un commentaire ?